Allemagne-La transition énergétique, succès à risque pour Merkel


29/08/2013 | 806 mots | ENERGIE RECRUTE | PÉTROLE, GAZ, CHARBON

Séduits par des aides publiques généreuses, les Allemands se sont engagés massivement dans le projet, installant des panneaux solaires par millions et des éoliennes par milliers, à tel point qu'ils voient aujourd'hui leur facture augmenter... pour financer les subventions.

L'expérience ambitieuse lancée par la chancelière, qui vise à terme à sevrer la première économie d'Europe de l'énergie nucléaire et à réduire la consommation d'énergies fossiles est suivie avec attention à l'étranger.

Mais la priorité d'Angela Merkel si, comme attendu, elle décroche un troisième mandat aux élections du 22 septembre, sera de trouver une solution pour freiner la hausse du coût de l'énergie.
Les aides publiques aux énergies renouvelables sont en effet si intéressantes en Allemagne que les contributions payées par les consommateurs pour les financer ont bondi de 47% cette année.

Les ménages et les entreprises commencent à souffrir et les exportateurs se plaignent de voir le virage énergétique gonfler les prix de l'énergie au point de nuire à leur compétitivité.

"Le dilemme de l'Allemagne consiste à maintenir les prix de l'énergie pour les industriels à un niveau assez bas pour préserver sa compétitivitité, tout en atteignant des objectifs (écologiques) ambitieux et en maintenant l'équilibre budgétaire", résume Will Pearson, chargé de l'énergie chez Eurasia Group à Londres.

OPINION PUBLIQUE FAVORABLE
L'opinion publique reste néanmoins largement favorable à ce virage, annoncé après la catastrophe nucléaire de Fukushima, au Japon, en mars 2011.

Le gouvernement Merkel s'était alors fixé comme objectif de porter la part des énergies renouvelables dans le "mix" énergétique allemand à 35% d'ici 2020 et à 80% d'ici 2050.
Face à ce soutien, l'opposition allemande peine à se démarquer de la politique actuelle depuis le début de la campagne électorale et elle n'ose pas proposer de renoncer au grand projet de l'équipe Merkel.

"La transformation énergétique revient un peu à envoyer l'homme sur la Lune : elle offre à l'Allemagne d'énormes opportunités pour les décennies à venir. Je n'ai rien contre cette idée", a ainsi déclaré Peer Steinbrück, le chef du file du Parti social-démocrate (SPD). "Mais Mme Merkel est en train de rater sa mise en oeuvre et nous allons changer cela."

Le SPD, qui a créé les premières aides aux énergies "vertes"
il y a plus de dix ans lorsqu'il gouvernait avec les Verts, a promis de réduire les taxes sur l'énergie.

Le pays compte déjà 1,3 million de panneaux photovoltaïques raccordés au réseau électrique et 23.000 champs d'éoliennes.
Angela Merkel devra, si elle obtient des électeurs un troisième mandat, s'employer à réformer le système des aides publiques.

Celui-ci se traduit pour l'instant par un alourdissement de toutes les factures d'électricité et ce mouvement est sans doute loin de s'interrompre.

"Les enquêtes montrent que les gens craignent de voir la transformation énergétique amputer leur niveau de vie", souligne Klaus-Peter Schöppner, de l'institut de sondages Emnid.

LES INDUSTRIELS MENACENT

Le sujet est préoccupant aussi pour les entreprises exportatrices, déjà déçues par la décision de Berlin de ne pas exploiter le gaz de schiste et qui voient les coûts de l'énergie augmenter, au risque de nuire à leur compétitivité internationale.

Malgré la baisse d'environ 20% des prix de gros cette année, l'Allemagne se classe au deuxième rang du classement des pays dans lesquels l'électricité est la plus chère en Europe.

"Les secteurs les plus énergivores, qui emploient plus de 900.000 personnes, devront quitter l'Allemagne à moyen terme s'ils n'obtiennent pas des prix de l'énergie durablement compétitifs", a prévenu le mois dernier le président de la puissante fédération de l'industrie BDI.

Les grandes compagnies d'électricité, comme RWE et E.ON, pénalisées par la baisse des prix de gros de l'électricité qu'elles commercialisent, plaident elles aussi pour une réduction des aides publiques. Certains acteurs du secteur ont menacé de fermer des centrales si la politique actuelle n'est pas remise en cause.


Angela Merkel a promis de modifier le barème des aides après les élections sans toucher au mécanisme lui-même. Mais au-delà, si l'elle l'emporte le 22 septembre, elle devra s'efforcer de trouver un équilibre délicat entre la poursuite de la croissance des énergies renouvelables et la satisfaction des consommateurs.
La solution dépendra peut-être du partenaire avec lequel elle formera une coalition.

Si elle reconduit son alliance avec les libéraux-démocrates du FDP, qui souhaitent une refonte globale de la loi sur les énergies renouvelables, elle pourrait opter pour une forte baisse des tarifs subventionnés. Mais si les résultats des élections la poussent à une "grande coalition" avec le SPD, la réforme pourrait être beaucoup plus limitée.

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